Bali : La culture collective plus forte que les personnalités

« Une entreprise est un lieu où des personnes qui ne se sont pas choisies sont amenées à passer sept heures par jour ensemble » : j’aime donner cette définition très personnelle de l’entreprise, car elle met en exergue la nécessité et la difficulté d’amener des interlocuteurs aux personnalités très différentes à travailler ensemble. Nous sommes là au cœur de l’efficacité relationnelle, qui constitue aujourd’hui un levier majeur d’amélioration de la performance.

À Bali, l’île indonésienne associée spontanément aux paysages de rizières en terrasse, les différents types de personnalité se côtoient bien évidemment, mais la problématique de l’efficacité relationnelle se pose beaucoup moins, en raison d’une culture collective plus forte que les personnalités.

Voici trois éléments constitutifs de cette culture balinaise si différente de la nôtre.

Les calendriers : la relation au temps

Les balinais utilisent 2 calendriers.

Le calendrier indo (indien)-balinais, déterminé par le cycle lunaire, est surtout utilisé pour définir les cycles agricoles. Il est constitué de 12 mois ayant chacun 29 ou 30 jours. L’ajustement nécessaire entre l’année solaire et le total des mois lunaires (354 j.) se fait tous les 30 mois en intercalant un mois supplémentaire.

Mais le calendrier le plus significatif pour les balinais est le calendrier javano-balinais. Il comporte 210 jours, répartis en 10 types de semaine différents, allant de la semaine d’une seule journée à celle de 10 jours, s’écoulant parallèlement et simultanément. Cette année de 210 jours débute par le Galungan, une période de 10 journées durant laquelle toute l’île est en fête pour commémorer la victoire d’Indra, dieu du tonnerre et de la pluie, contre le roi balinais Mayadenawa, qui interdisait à son peuple de pratiquer le culte hindou. Le 1er jour de Galungan tombe toujours un mercredi. Pendant ces 10 jours, les dieux et les ancêtres descendent sur terre pour rendre visite aux familles. En général les balinais rentrent dans leur village natal pour célébrer cette fête ensemble jusqu’au jour de Kuningan 10 jours plus tard, au cours duquel ils disent au revoir à leurs dieux et à leurs ancêtres.

L’organisation sociale : la relation à la collectivité

La structure sociale balinaise est complexe, à l’image des pratiques religieuses, de l’organisation de l’espace et de celle du temps. La cellule religieuse est le desa(le village), qui a pour fonction première d’organiser la vie religieuse avec les prêtres du village.

La cellule civile est le bandjar, qui regroupe un certain nombre de familles vivant dans le même quartier. Certains bandjars sont à cheval sur plusieurs villages voisins, ce qui complique la structure sociale.

Par ailleurs la culture du riz et la nécessité de l’irrigation ont amené les agriculteurs à se regrouper en subaks, organisations qui gèrent l’eauet qui en raison du relief ne correspondent pas aux limites des desas et des bandjars. Comme le riz est la base de l’alimentation et est la principale culture dans le sud de l’île, les subaks jouent un rôle très important.

Les règles de fonctionnement et de participation à ces différentes entités sont très précises et doivent être respectées, avec le risque d’en être exclus si elles ne le sont pas, ce qui est extrêmement grave pour les balinais.

Enfin il existe de nombreuses associations auxquelles participent les balinais, qui sont très attachés à la vie communautaire.

Cette organisation sociale multidimensionnelle est difficile à appréhender pour les occidentaux qui découvrent Bali, impressionnés par une telle complexité sur un aussi petit territoire.

Les prénoms : la relation à l’individu

À Bali vous rencontrez souvent des personnes portant le même prénom, il s’agit en effet d’une tradition.

Voici les 4 prénoms des balinais de la caste des Sudra, caste la plus basse à laquelle appartient la majorité des balinais. Le 1er enfant s’appelle Wayan, qui vient du mot Wayahan signifiant « l’aîné ». Le 2ème enfant s’appelle Made qui signifie « moyen ». Le 3ème enfant s’appelle Nyoman, qui signifie « le dernier ». Le 4ème s’appelle Ketut qui signifie « la fin ».

Pour différencier le prénom fille ou garçon on met devant NI pour une fille et I pour un garçon. A partir du 5ème enfant on recommence à partir du 1er prénom.

Désormais le gouvernement indonésien invite les parents à se limiter à 2 enfants, ce qui est généralement suivi. Les Nyoman et les Ketut commencent donc à se faire rares.

Ces trois éléments (ce ne sont bien entendu pas les seuls) montrent en quoi la culture collective est un facteur d’efficacité relationnelle à Bali, dans le sens où elle prend le dessus sur les personnalités individuelles.

Au fur et à mesure que l’on découvre la culture balinaise, on prend alors conscience de l’ampleur du travail à réaliser au niveau de l’efficacité relationnelle dans nos sociétés occidentales beaucoup plus individualistes.

Jim BREMAUD

Publié le 02/07/2018